41 – Noël à Dakar
41 – Noël à Dakar

41 – Noël à Dakar

Au près serré vers Dakar

Nous avons promis aux garçons que nous ne naviguerions ni les 24-25 décembre, ni le 31… Nous avons donc quitté les Bijagos, en direction du nord pour fêter Noël à Dakar où nous devions récupérer une pièce mécanique commandée de longue date. Pour l’instant, je n’entrerai pas dans les détails techniques, car nous ferons un article séparé sur notre « virage technique de l’année » !

Après 3 jours au près, avec une coque « vérolée », (c’est-à-dire qu’après avoir passé près de 2 mois dans des eaux très riches en organismes de tout genre, elle était couverte de coquillage, algues,…), affrontant les vagues et le vent, nous arrivons à Dakar… de nuit à nouveau ! L’air frais nous surprend. On parle de 22-25°C dans la journée, 18-22 la nuit. Après les plus de 30° aux Bijagos, nous avons l’impression d’être en hiver !

Noël à Dakar

Noël approche, et nous trouvons une grande librairie internationale, ce qui règle la question des cadeaux de Noël. Nous sortons de la boutique au bout de 25 minutes avec 2 sacs lourds remplis de livres. Heureusement, notre bateau mesure 15 mètres de long !

Comme le Sénégal est majoritairement musulman (97 % officiellement), il n’y a pas vraiment d’ambiance de Noël à Dakar, mais, ici et là, il y a des palmiers joliment décorés ou des rues avec quelques lumières de Noël. Et le plus beau, c’est qu’ici, toutes les religions se joignent joyeusement aux célébrations des uns et des autres. Comme quoi, il est possible de vivre ensemble en paix !

Resto sympa

Certains restaurants sont également très agréables : nous passons ainsi une soirée au Centre Culturel Français de Dakar. Il est situé dans un cadre étonnant, au milieu de la ville, avec un jardin clos et une nourriture raisonnablement bonne ! Nous nous offrons ce plaisir comme notre dîner de Noël personnel…

BBQ de Noël avec un arrière-goût amer

Nous passons le jour de Noël à Dakar avec d’autres marins au CVD (Cercle de Voile Dakar) où nous organisons un BBQ ensemble, en partageant les frais. Tout se passe bien et tout le monde aide à préparer la nourriture et les tables pour les 17 personnes qui ont dit qu’elles se joindraient à nous. L’ambiance est bonne, il y a de la musique en fond sonore, les tables et les chaises sont bien rangées.

Buffet ouvert ?

Nous commençons le grill et ça sent bon les différentes viandes que nous avons trouvées chez un boucher sympa. On grignote, on boit, les salades sont préparées, le pain est sur la table… Mais dans notre organisation, nous n’incluons pas les 15 autres personnes qui s’invitent et savourent avec plaisir notre buffet bien préparé… Le problème n’est pas tant le coût (enfin, quand même un peu !) mais surtout le fait qu’il n’y a finalement pas assez de nourriture pour les gens qui la payent ! Qu’est-ce qu’on peut dire ? Il était plutôt difficile de ne pas servir les amis et la famille des personnes travaillant pour le CVD, qui « se trouvaient là par hasard ».

A cet endroit j’aimerais introduire le commentaire écrit par Alexander. Je cite :

Je cite: « ATTENTION ! NOTE D’ALEXANDER ! »

 » Il y avait un troupeau de gens qui n’étaient pas invités. RÉVOLTANT ! Il y avait aussi une dame stupide qui prenait une énorme quantité des meilleurs morceaux de viande, de riz, de salade et d’autres légumes ! THIEEF ! VOLEUR ! SIDERURGIE ! GANGREUR ! DEALER ! L’ÉCLAIRCISSEUR ! OUTLAW ! LAWBRAKER ! CONVICT ! CROOK ! INFRACTION ! VILLAIN ! LAG ! DELINQUENT ! CULPRIT ! PÉCHEUR ! « 

En attendant, nous avons parlé aux garçons pour voir avec d’autres yeux cette expérience finalement amusante,…

Heureusement, nous avons réussi à garder les deux bouteilles de champagne, la pastèque et le gâteau au gingembre que nous avons mangés et bus après le départ de toutes les personnes non invitées… Avec le recul, nous avons dû réaliser que nous sommes en Afrique, où le partage fait partie de la culture. Quelque chose que nous devons apprendre…

Gestion des stocks

Après les semaines de navigation sur les fleuves et dans l’archipel des Bijagos, notre stock de nourriture commence à s’épuiser. Excepté aux Bijagos, nous avons réussi à trouver des fruits, des légumes, des œufs et du pain dans de nombreux endroits. Mais quelle joie d’entrer dans un immense Carrefour où l’on trouve tout ce dont on a envie ! Fromage (pas suisse !), crème fraiche, lait frais entier, pain de campagne, champignons, jambon et salami, risotto, sirop, vin, champagne pour le 31 et le futur passage de l’équateur… nous remplissons nos sacs de courses et le coffre entier d’un taxi. Environ 50 – 60 kg de nourriture ?…

Pas de taxi-boat ce soir

Arrivés à la marina avec le taxi (ou plutôt Heech, la solution Uber du Sénégal), les ennuis commencent : les 5 sacs de courses et les 2 sacs à dos doivent rejoindre le bateau. Comme tous les autres marins, nous comptons sur le bateau-taxi du club pour nous amener à terre et nous ramener en fin de journée. Malheureusement, ce jour-là, le moteur du bateau-taxi est tombé en panne et nous nous retrouvons avec tous nos sacs sur la jetée en bois branlante… en vain. Nous ramenons donc tous nos achats au club, buvons une bière et attendons que quelqu’un ayant un canot pneumatique à terre nous ramène à notre bateau.

La raison pour laquelle la plupart des gens préfèrent prendre le bateau-taxi plutôt que leur propre canot pneumatique est qu’après quelques jours dans les eaux boueuses de Dakar, le dinghy a un aspect déplorable et commence à être couvert de végétation. En plus, il faut toujours l’attacher en toute sécurité à l’embarcadère et espérer le retrouver après une journée d’escapade.

Un gentil marin nous ramène plus tard dans la soirée et, avec tout le rangement, on se couche assez tard dans la nuit…

Eau et carburant

Le dernier jour, nous avons reçu à bord, via le bateau-taxi, réparé !, 500 litres de diesel dans divers conteneurs de 10, 20 et 40 litres (à un tarif spécial de contrebandier, grâce aux contact de notre pirate !). Oliver filtre toutes les bouteilles à l’aide d’un tissu afin d’éviter toute saleté dans les réservoirs. Quel travail ! Salissant, nauséabond, lourd et long – une tâche vraiment désagréable. Bravo à Oliver. Pendant ce temps, Jean-Luc assiste Oliver et court partout pour préparer le bateau à naviguer et Alexandre et moi remplissons 400 litres d’eau potable dans nos réservoirs d’eau.

Nous sommes prêts à partir. Pour où ? Au Cap-Vert ! Pour rejoindre nos amis de Touka et Orion à Mindelo et fêter le réveillon 😊.

Mais pas si vite !

On est coincé, heureusement…

Nous quittons Dakar à 16h30 le 27 décembre, en espérant passer le port et le passage au large en plein jour. Tout va bien, beau coucher de soleil, mais le vent est encore faible, alors nous marchons à voile et à moteur. La lumière du jour commence à baisser. Je suis à la barre et soudain, à la dernière seconde, j’aperçois une ligne de pêche non éclairée sur notre route. Je mets la barre à fond sur tribord, je sors la vitesse pour arrêter l’hélice de tourner, mais il est trop tard : le fil de pêche est emmêlé autour de notre hélice ! Nous sommes sérieusement coincés !

Dangereux et sanglant !

Des pêcheurs en pirogue viennent vers nous, nous essayons de communiquer mais personne ne parle français. Nous leur disons qu’il faut couper le filet en montrant notre couteau. Ce ne semble pas être leur filet et ils nous font comprendre que nous pouvons le couper. Jean-Luc se place avec un couteau de plongée très aiguisé sur le pont arrière et commence à couper ce qu’il trouve, descend l’échelle de bain et attrape en dessous le gouvernail : du filet partout. Il coupe tout ce qu’il peut – ainsi que lui-même ! Ceci fait et Jean-Luc dégoulinant de sang dans le cockpit, nous nous remettons en route lentement. L’hélice semble réagir comme il se doit.

Sortons d’ici

Entre-temps, la nuit est tombée et nous voyons apparaître de petites lumières colorées tout autour de nous, à des kilomètres à la ronde. Un vrai champ de mines ! Des filets de pêche ont été allumés un peu partout. Nous n’en voyions aucun il y a à peine une demi-heure ! Et des pêcheurs en pirogue qui s’inquiètent pour leurs filets nous envoient des pointeurs laser verts pour nous aviser de la présence de leurs filets…. Quelle pagaille ! Jean-Luc se fait un bandage autour de sa main coupée. Puis nous essayons de nous concentrer pour sortir de ce labyrinthe. il nous faudra 5 à 6 heures pour trouver la sortie. D’abord en retournant vers le rivage, puis en longeant au rivage vers le nord, puis gentiment en prenant notre cap vers l’ouest, toujours zigzaguant entre les filets de pêche.

L’adrénaline nous tient bien éveillés jusqu’à ce que nous ayons les dernières lumières derrière nous à 2 heures du matin… Finalement, nous avons eu beaucoup de chance de nous retrouver coincés dans un filet au tout début, alors qu’il faisait encore jour : l’avertissement a été à peu de frais et nous avons pu nous en sortir sans trop de dommages.

Traversée de 3 jours

Nous traversons dans des conditions raisonnables, mais à nouveau au plus près, ce qui signifie que notre bateau gîte constamment. Il est donc difficile de se déplacer dans le bateau, de travailler à l’école et de cuisiner. Nous arrivons à Mindelo, au Cap-Vert, …de nuit ! Caramba, encore raté ! Encore une fois plus vite que prévu, nous arrivons dans la zone de mouillage, complètement saturée et nous zigzaguons entre les bateaux. Deux bateaux amis sont encore éveillés (il est plus de minuit ! Ce n’est pas une heure où les marins sont normalement réveillés…) et nous saluent. Bel accueil 😊, merci SV Margna et Orion !

Il nous faut 3 tentatives pour jeter l’ancre avec suffisamment d’espace pour qu’Illika puisse tourner autour de son ancre avec le vent…

C’est l’heure de la fête !

Nous sommes heureux d’avoir deux jours pour rattraper le sommeil manquant, nettoyer le bateau et nous organiser pour le réveillon. Le 31, nos amis d’Orion accueillent sur leur catamaran au mouillage 4 autres bateaux, soit un total de 15 personnes ! Bravo Cécile ! Organisé comme ce que nous appelons en Suisse un dîner canadien, pour les Français une « auberge espagnole » : tout le monde apporte sa part du buffet. Nous passons une soirée absolument fabuleuse sur Orion, suivie des feux d’artifice de Mindelo que nous regardons depuis la marina, puis d’une fête de rue animée avec des concerts et des milliers de personnes.

Les garçons réussissent également à utiliser nos dernières réserves de feux d’artifice de l’année dernière, car nous n’avons jamais pu les utiliser, étant arrivés au Maroc avant le réveillon du Nouvel An. Au Maroc, les feux d’artifice personnels sont interdits…

Préparation de la Transat

Comme Jean-Luc profite de cette dernière occasion pour rentrer en Suisse à moindres frais. Donc nous nous mettons à l’abri dans la marina : je n’aime pas être au mouillage seule avec les garçons. Cela nous permet aussi de préparer plus facilement notre traversée de l’Atlantique. Pendant l’absence de Jean-Luc, nous reprenons le rythme école-cuisine-à-faire-liste et après-midi-plaisir. Nous retrouvons parfois d’autres plaisanciers pour un verre ou une collation. Nous allons à la plage, nous discutons sur la jetée et une fois nous refaisons la randonnée jusqu’au phare Dona Amelia avec nos amis d’Orion et de Touka.

Deux jours avant le départ, 2 autres bateaux arrivent avec 4 garçons qui ont plus ou moins l’âge d’Oliver et Alexander… Ils se retrouvent et s’amusent à longer les pontons, à passer d’un bateau à l’autre, à faire des jeux. Le temps était malheureusement trop court avant de devoir se dire au revoir.

Une grande étape à venir

Nous quittons Mindelo le 17 janvier pour traverser l’Atlantique. Notre objectif est de rejoindre Touka 24 heures plus tard à la hauteur de l’île la plus méridionale du Cap-Vert, Brava, pour eux dernière étape du Cap-Vert. Notre destination est l’île de Fernando de Noronha, à 200 milles des côtes brésiliennes, à 1450 milles de Mindelo. Les alizés sont annoncés réguliers pour les prochains jours, la mer légèrement inconfortable avec une bonne houle (tout ne peut pas être parfait, n’est-ce pas ?), la météo favorable, le pot au noir peu présent. Temps de navigation estimé avec les conditions annoncées : 10-12 jours.

C’est du gâteau!

Tous les marins qui ont déjà traversé l’Atlantique disent « c’est du gâteau », « ça vient de derrière, le vent, les vagues, pas de soucis », « c’est tellement paisible ». Ils ne disent ça que pour ne pas être découragés dès le départ, je pense ! On verra bien !

Quoi qu’il en soit, nous entamons notre transat de façon, je trouve, assez zen, détendue et bien préparée…

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